Articles > Scoutisme et jeux de rôles font-ils bon ménage ?

par Patrick Loranger (Technotron), 10 février 2012

Le scoutisme est un phénomène qui remonte à 1907, quand un certain Baden-Powell, haut gradé de l’armée de Sa Majesté, fonde un mouvement de jeunes qui se déroule en pleine nature, sur l’Île de Brownsea, dans le sud de l’Angleterre. Dans le contexte de l’époque, le mouvement a suscité une vague d’admiration et s’est vite répandu dans tous les pays du monde sous la pression des jeunes qui s’inspiraient des exploits de B.P.

Le chef scout place les jeunes devant un défi, qu’ils doivent relever en faisant appel à ce qu'il y a de meilleur en eux en termes de connaissances et d'expérience. Quand ils se plantent, ils nettoient leurs genoux éraflés et retroussent leurs manches. Les scouts acquièrent des compétences techniques, humaines et sociales afin d’accéder aux attentes de leur chef. J'imagine qu'ils en retirent un certain bienfait, car ils se montrent fidèles au mouvement depuis 1907 et ce, sans relâche, année après année. Plus de 250 millions de gens ont été scouts durant leur jeunesse, ce qui inclut des personnalités publiques tels des politiciens, des acteurs et des musiciens.

Le jeu de rôles est un phénomène social qui remonte aux années 70, avec la sortie du désormais célèbre Donjons et Dragons. Depuis, ces jeux se multiplient par la voie underground, sans que les gens en général ne comprennent ce dont il s'agit au juste. Le fait qu'on ne trouve pas ces jeux en librairie, mais seulement dans des boutiques spécialisées dans les jeux de rôles et bandes dessinées aurait-il contribué à susciter une certaine controverse ?

Quand je dis que je suis rôliste, bien des gens pensent que je me déguise en chevalier ou en elfe noir et que je pars pour Bicolline deux mois par année afin d'aller dilapider mon argent durement gagné à tabasser d'innocents lutins avec ma redoutable épée en mousse...

Clarifions les choses: je ne possède pas d'épée ni d’armure. Je suis Narrateur dans un club de jeux de rôles que j’ai fondé. Cela implique que je raconte des histoires à des joueurs qui jouent le rôle d'un personnage (chacun) dans l'histoire que je raconte. Les joueurs doivent se débrouiller avec un scénario qui se complique à chaque décision qu'ils prennent. L'action capte leur attention et l'intrigue fait travailler leurs méninges, les incitant à trouver moult solutions pour la faire avancer. Quand ils se plantent, il n’y a ni blessure ni dégâts : tout est théorique et purement narratif. On rigole un bon coup et on recommence.

En tant que Narrateur, je fais appel à ce qu'il y a de meilleur en eux en termes de connaissances, d'expérience et de culture, afin qu'ils réussissent la mission qu'un de mes personnages leur a confié. J'imagine qu'ils en retirent un certain bienfait, car ils subissent ma torture intellectuelle depuis 1996 et ce, sans relâche, année après année, et ils en redemandent. J'ai même dû refuser des joueurs tant la demande fut importante, à une certaine époque. La multiplication des activités sociales de tous genres confondus a fait en sorte que la demande baisse ces dernières années, ce qui allège mes horaires.

Je pratique le jeu de rôles depuis l’âge de douze ans et le scoutisme depuis l’âge de 22 ans. Selon mon expérience de la vie, le scoutisme et les jeux de rôles partagent un lien ténu: les jeunes et les animateurs. Parmi eux, plusieurs ont partagé avec moi vie scoute et jeux de rôles, depuis mon entrée en service dans le mouvement. La cohabitation est harmonieuse, la plupart du temps. Lorsque ce n'est pas le cas, c'est que des gens mélangent les contextes.

Ceci m’amène à devoir clarifier un point important : les jeux de rôles que j'organise à titre privé ne font pas partie des activités d'aucun groupe scout, qu’il soit affilié ou non au scoutisme mondial, et ces activités n'ont aucun lien avec le mouvement scout. Le mouvement scout se dissocie donc officiellement de ces jeux qui rejoignent souvent le même public que leurs activités.

J’ai le devoir d’informer les parents qui m’envoient leurs jeunes qu'ils assument la pleine responsabilité de laisser participer leur enfant aux activités de jeux de rôles, que j’organise, je le rappelle, en dehors du cadre scout.

Pour en savoir plus sur les jeux de rôles, je vous suggère l’article de Wikipédia.

Patrick Loranger, auteur, rôliste et scout en service